Billet

T2 Chinois Blanc

 

Mon petit chinois blanc, constant voyageur d’un tramway nommé vampire, dévitalisé, ton regard vide se pose sur un jeune homme, fol ingénu des temps modernes, beauté concentrée sur son propre univers. En hématobe, tu le reluques, plein de désirs et d’amertume. Il sent le musc, et tu le sens, comme c’est divin, ton petit muscle : une discrète bandaison ourle le tissu gris de ton pantalon !
 
Mon petit chinois blanc, à peine ému de la circonférence, l’essor pénible de ta protubérance, tu restes imperturbable, les yeux fixés sur lui, son ego qui te dévore peu à peu. Tu le sais, au fond, c’est toujours la même histoire, ourlé de fils blancs, et de tâches noires : ce jeune homme n’aime ni les petits, ni les Chinois, ni les blancs, ni les noirs : sans doute préfère-t-il quelques excursions sexuelles dans les caves de Vaulx-en-Velin, et les parkings déserts qui donnent à Vénissieux ce petit côté tourisme sexuel fort apprécié de certains invertis qui trouvent dans le danger les prémisses de la jouissance.
 
Sa physionomie trahit ses préférences, sa bouche, l’annexe de son fondement, le sanctuaire même de toutes les perditions :
sa destination préférée n’est pas la Thaïlande.
 
Mon chinois blanc, je sais que tu descends à Berthelot, face aux anciens quartiers de la Gestapo, déçu, toujours, de ces configurations humaines qui se façonnent sous tes yeux et dont tu es exclu à jamais, car trop patient, trop discret, trop chinois, bien trop blanc. Je te vois très souvent me regarder quand je descends du tramway nommé désir et ressens, affable et délétère caresse, ton appel au secours, qui est aussi le mien. Nous sommes les prisonniers de nos mythes urbains. 

 

Texte écrit 8 juin 2012
Ce texte fait partie de l’anthologie Au Bonheur des Drames :

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juillet 12th, 2012 at 10:11

Et quand il disparait au coin de la rue, tu ris jaune?
Je crois que je vais me mettre à fréquenter les transports en commun!

juillet 13th, 2012 at 3:15

Les transports en commun, c’est toujours une source d’anecdotes diverses mais hélas trop souvent une expérience désagréable (bruit, violence latente, manque d’hygiène et de civilité). Je l’aime bien ce chinois (car il existe bel et bien, lui); toujours très calme et un peu ailleurs. Si je le ne le vois plus, qui sait, sans doute rirais-je jaune, oui.

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