Billet

Sur l’Amour

 

Ben quoi, il est parti, il a pris le train que déjà il me manque : saveur d’autrefois, rappel des premières fois, quand la passion folle dessinait des destins foudroyants, avant que tout ne s’effondre, parce que la vie est plus forte, qu’elle semble avoir tous les droits avec ses plans à la con, ses drames à la petite semaine, ces tragédies fulgurantes qui nous font découvrir la mort et ses armes foudroyantes. Et là, l’improbable : c’est un nouveau lui, c’est un nouveau moi. En version 2.0 pour une quatrième saison : celle de la nouvelle chance. Ou bien n’est-ce qu’un reboot malencontreux né d’un scénariste un peu pervers, un peu génial, mais surtout franchement fou, assurément furieux – et nous ne sommes pas de ceux qui condamnent la folie. Seules comptent les certitudes : nul besoin de fermer les yeux pour convoquer des images d’autrefois, ces sensations de manque s’imposent d’elles-mêmes, s’écrivent au présent, tissent les mailles lumineuses de l’avenir : lui, devant moi, son sac à dos, la saveur d’un au revoir avec un goût d’adieu. Et, même si les baisers sont plus éteins, moins fougueux qu’autrefois, à peine l’homme parti que son absence raisonne, déchire l’être. Certains diraient : le cœur.
 
Cette métaphore, ou plutôt cette métonymie du cœur employé à tout va lorsqu’on parle de l’amour m’a toujours semblé totalement abstraite, pour ne pas dire ridicule : j’imaginais plutôt un coin de l’esprit, entre l’imaginaire et l’espoir, sur une immense carte de tendre cérébrale. Mais finalement, pourquoi vouloir situer quelque chose de si mystérieux, qui ne répond à aucune règle précise, évolue parfois en dépit du bon sens et flirte souvent, côté balistique, avec le paranormal ?
 
Sans doute parce que cette image enfantine rassure, rassemble lors même que l’organe, qui nous maintient en vie par sa régularité métronomique, est, n’ayons pas peur des mots, totalement dégueulasse : une grande brasserie du sang, une station d’épuration. Ce coeur, tel que dessiné avec acharnement par les enfants, les amoureux transis, les aficionados des réseaux sociaux, montre deux moitiés, tout à fait collées, formant un tout parfait, une complétude idéale qui raisonne comme un souvenir viscéral, immanent, du Banquet.

 

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Mister Freak
juin 18th, 2017 at 10:00

C’est peut-être bien cela le phénomène du passage de l’amour passion à l’amour tendresse. L’amour de métamorphose mais l’amour reste. Tout est sauf. 🙂

Mister Freak
juin 18th, 2017 at 10:01

*se métamorphose.

juin 18th, 2017 at 10:37

Ca me fait penser à cette phrase qui m’a toujours hanté « l’amour est à réinventer » de Rimbaud dans une Saison en Enfer. Et si l’amour, au fond, se réinventait tout seul malgré nous et les exigences de la vie ?

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